Pendant que Dragon Ball se la coule douce avec ses cinquante spin-offs en Super Saiyan et que One Piece continue de coloniser nos consoles comme Luffy cherche le One Piece, Bleach, lui, était… eh bien, à la retraite. Oublié dans les limbes vidéoludiques, avec pour seuls souvenirs des titres relégués aux générations PS3, Nintendo DS et Wii. Autrement dit, à l’ère des dinosaures du pixel.
Faut dire que Tite Kubo, avec son style unique et ses coupes de cheveux défiant la gravité, n’a jamais vraiment eu droit à une adaptation jeu vidéo digne de son œuvre. Oui, on a eu droit à quelques apparitions d’Ichigo et Aizen dans des projets fourre-tout comme Jump Force, mais bon… un peu comme si on avait mis du caviar dans une salade de pâtes froide. Présents, mais sans saveur.
Mais voilà que débarque Bleach Rebirth of Souls, annoncé tel un bankai salvateur, une promesse d’hommage vidéoludique à l’univers de la Soul Society. Et cette fois, pas de fausses promesses : le jeu veut respecter l’ADN de la série, son style, son intensité, et surtout ce petit quelque chose qui fait qu’un combat entre shinigamis, c’est plus qu’une simple baston — c’est de la poésie sanglante.
Une annonce qui a éveillé les espoirs des fans comme un zanpakutō oublié qui se réveille d’un long sommeil. Et si c’était enfin le come-back tant attendu de Bleach sur nos consoles modernes ?
Trois arcs, pas un de plus. Voilà ce que propose Bleach Rebirth of Souls pour son mode histoire. On y revisite les grands classiques du manga avec un enthousiasme plutôt communicatif :
La saga Substitute Shinigami, quand Ichigo devient un apprenti faucheur d’âmes malgré lui.
La saga Soul Society, probablement la préférée des fans, avec son invasion kamikaze du QG des shinigamis pour sauver Rukia, le tout emballé dans des combats contre les Capitaines les plus charismatiques (et les plus coiffés) du Gotei 13.
Enfin, l’arc Arrancar, jusqu’au face-à-face tendu avec ce bon vieux Aizen, toujours aussi manipulateur que bien coiffé lui aussi.
Ce que le jeu oublie ? Tout le reste.
Les fillers sont aux abonnés absents — bon, on ne va pas les pleurer, même si certains avaient du potentiel côté décors et roster. Plus gênant : la saga Fullbringer est passée sous silence, tout comme les Vizards, qui auraient pourtant mérité un peu plus de love, surtout dans la seconde moitié du manga. Quant à la saga finale avec les Quincy ? Elle est promise pour plus tard, comme un DLC qui arrive avec son propre sablier narratif.
Malgré ces oublis assumés, le mode histoire se tient. Il offre plusieurs heures de contenu, bien rythmé, qui survole intelligemment l’essentiel du manga sans s’embourber dans les dialogues de 12 pages sur l’amitié, la souffrance ou la coupe de cheveux d’Urahara. Certaines scènes sont rendues en 3D avec le moteur du jeu, d’autres passent par des transitions 2D façon roman visuel. Un mélange qui fonctionne… à moitié. Certaines séquences claquent, d’autres tombent un peu à plat, comme si elles avaient été rushées entre deux pauses café.
L’intention, en tout cas, est claire : faire un tour d’horizon des fondations de Bleach, histoire de rappeler aux nouveaux venus pourquoi ce manga a sa place dans le panthéon des “big three”, aux côtés de Naruto et One Piece, et de réveiller la fibre nostalgique des fans de la première heure.
Avec une trentaine de personnages jouables, Rebirth of Souls ne vise pas la quantité, mais plutôt la qualité. Et là-dessus, chapeau bas : chaque perso a été conçu avec soin, pas seulement pour ressembler à son modèle papier, mais pour jouer comme lui. Leur style de combat, leurs capacités, la sensation en main : tout est calibré pour qu’on sente vraiment la différence entre un Kenpachi brawler et un Byakuya tout en élégance létale.
Oui, il y a quelques déséquilibres – Aizen en mode final, par exemple, fait passer les autres pour des stagiaires en kendo – mais dans l’ensemble, le roster est bien équilibré. Pas de personnages trop cheatés ni de boulets inutilisables à part pour les défis masochistes.
Côté gameplay pur, le jeu est divisé en trois gros blocs :
Le mode histoire, donc.
Les batailles locales et en ligne (sans classement, hein, faut pas trop en demander non plus).
Et les défis solo, avec une difficulté progressive mais un petit goût de “déjà-vu” qui s’installe vite.
Les arènes, elles, se comptent sur les doigts d’une main (si vous avez perdu deux doigts au combat) : Karakura Town, Soul Society, Hueco Mundo… et, plus sympa, la grotte d’entraînement de Yoruichi, qui sert aussi de tuto de départ. Un choix malin, mais qui fait vite tourner en rond, surtout en multi où les mêmes décors reviennent comme un mauvais running gag.
Tamsoft a visiblement médité très fort sur le zen du game design avant d’accoucher de Bleach Rebirth of Souls. Résultat : un jeu de combat en arène qui jongle avec talent entre accessibilité bienveillante et profondeur tactique retorse. Que vous soyez un vétéran du versus fighting ou un fan de manga qui n’a jamais tenu une manette plus de cinq minutes sans invoquer la touche pause, ici, tout le monde trouve son bonheur. Ou au moins son chaos organisé.
Forget la barre de vie classique : ici, les joueurs se disputent des Konpaku — des vies spirituelles qu’on fait sauter une à une comme des ballons de baudruche sous tension. Pour les atteindre, il faut d’abord faire fondre la barre de Reishi, qui joue le rôle d’une armure. Une fois le Reishi à 30%, la vraie baston commence : c’est là que les Kikon, attaques spéciales dévastatrices, entrent en scène pour gratter de la vie façon détartrage de sabre.
Et c’est là que le cerveau entre en jeu :
Vous tentez le coup critique dès le seuil atteint ?
Ou vous continuez à grignoter le Reishi jusqu’à zéro pour maximiser les dégâts, au risque de prendre un retour de flamme digne d’un Hollow furax ?
Bienvenue dans la psychologie du Shinigami.
Les commandes sont d’une clarté presque suspecte :
Combos légers et lourds pour faire danser les pixels.
Techniques spéciales (deux par perso, merci l’équilibre).
Et bien sûr, la garde, parce qu’on ne peut pas toujours tout esquiver avec panache.
Mais la vraie trouvaille, c’est la barre « Reverse », placée sournoisement en bas de l’écran. Elle monte à mesure que vous donnez ET prenez des coups (l’égalité des chances dans la douleur), et vous permet de :
booster vos attaques,
renforcer vos défenses,
ou carrément briser un combo ennemi et contre-attaquer avec le style d’un capitaine du Gotei 13 qui aurait lu Sun Tzu.
Bien utilisée, la barre Reverse transforme une branlée annoncée en comeback épique. Mal utilisée… eh bien, c’est retour au menu.
Pas de Bleach sans Zanpakutō, évidemment. Chacune a son style, son tempérament, ses pouvoirs — et dans Rebirth of Souls, elles brillent plus qu’un Bankai un jour de solstice. Chaque personnage peut évoluer, débloquer son Shikai (premier power-up), voire son Bankai, transformation ultime qui fait exploser les compteurs et les arènes.
Vous préférez les furies élémentaires ? Tensa Zangetsu vous servira une vitesse supersonique façon Sonic sur boost. Vous aimez le contrôle du terrain ? Tōsen vous plonge dans les ténèbres avec Suzumushi. Et si vous êtes du genre à aimer les créatures stylées, les Arrancar se transforment avec leur Resurrección en monstres de charisme et de destruction massive.
Mention spéciale à Ulquiorra, qui débloque une deuxième transformation (parce que pourquoi pas), et à Aizen, le boss suprême qui, fidèle à sa réputation, finit littéralement par monter au niveau “Dieu-mode”. Oui, c’est aussi injuste que ça en a l’air. Et on adore.
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Bon, remettons les choses dans leur contexte : non, Bleach Rebirth of Souls n’est pas un chef-d'œuvre taillé dans le seireitei. Oui, les arènes sentent parfois un peu le copier-coller de dernière minute, et quelques textures sur PS5 ont l'air de sortir tout droit d’un filtre Instagram de 2013. On ne va pas non plus faire semblant : le contenu, sans être radin, reste dans les clous du “juste assez”. Mais... et c’est un gros mais... ce jeu a le mérite de colmater une brèche béante dans le mur de la pop culture vidéoludique. Depuis plus de dix ans, les fans de Bleach n’avaient rien à se mettre sous la dent – à part quelques figurines poussiéreuses et un espoir mal entretenu. Grâce à l’adaptation récente de l’arc final en anime, l’univers de Tite Kubo est revenu sous les projecteurs, et Rebirth of Souls surfe avec élégance sur cette vague de spiritual pressure retrouvée. Ce qui sauve vraiment le titre, c’est son système de combat. Bien foutu, il propose des mécaniques originales sans tomber dans le piège du bouton unique à spammer. L'équilibre est finement dosé : accessible pour les néophytes, mais avec assez de profondeur pour que les vétérans des arènes en ligne y trouvent leur adrénaline. Et surtout, le style “Kubo” transpire de chaque animation, de chaque duel improbable entre un shinigami taciturne et un arrancar en mode drama queen. Oui, le jeu a ses défauts, mais il a aussi quelque chose d’essentiel : l’âme. Et s’il reçoit le soutien qu’il mérite — à coups de mises à jour et de contenu bien senti —, Bleach Rebirth of Souls pourrait bien devenir le point d’ancrage vidéoludique que la licence attendait depuis... allez, soyons honnêtes : Bleach: Dark Souls sur DS.
Yakudark