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SaGa Frontier 2 – Le retour de la saga que vous n'avez peut-être jamais comprise (et c’est pas grave)

Née comme une excroissance étrange et fascinante de Final Fantasy (un peu comme ce cousin éloigné qui vit en roulotte et parle aux plantes), la série SaGa est depuis toujours une anomalie assumée dans le paysage du JRPG. On l’adore ou on la fuit comme un combat aléatoire mal codé : il n’y a pas vraiment d’entre-deux. Expérimentale dès ses premiers balbutiements, la série a été confiée à Akitoshi Kawazu, un monsieur qui avait bossé sur le tout premier Final Fantasy et qui s’est réveillé un matin en se disant : “Et si on faisait un RPG où rien n’a de sens mais tout a du style ?” Challenge accepté.

Kawazu, donc, devait transplanter le JRPG sur Game Boy. Mais au lieu de nous servir un clone miniaturisé de Final Fantasy, il a décidé de tout casser, de tout mélanger, et de faire du SaGa : une série où les mécaniques semblent écrites par un poète maudit, où les statistiques montent sans prévenir, où les personnages apprennent des techniques au pif, et où le joueur est abandonné dans la nature avec une boussole cassée et un manuel en sanskrit. Mais bizarrement… ça fonctionne. Pour certains. Pour d’autres, c’est un cauchemar vidéoludique.

Car oui, bien que relativement obscure, la série compte une bonne douzaine d’épisodes (si, si), sans oublier les innombrables remakes, remasters et reboots diffusés avec la même discrétion qu’une réunion de copropriété. Et SaGa Frontier 2, sorti en 1999 sur la bonne vieille PlayStation grise, fait partie de ces jeux qu’on ne sait pas trop où ranger : chef-d’œuvre incompris ou délire de développeurs en pleine crise existentielle ? Les deux, probablement.

Et voilà que Square Enix, toujours à l’affût d’un vieux titre à recycler (parfois avec amour, parfois avec Photoshop), annonce et lance le remaster de SaGa Frontier 2 dans la même journée. Pas de conférence, pas de tambours, pas de violons. Une bande-annonce lancée entre deux publicités pour des skins de Final Fantasy XIV, et hop, c’est dans le store.

Alors pourquoi s’y intéresser ? Parce que ce jeu-là, plus que les autres, possède quelques atouts qui pourraient bien convertir les plus sceptiques. Si, si. On vous jure.

Mais avant d’entrer dans le vif du sujet, une mise en garde : SaGa, c’est comme le tofu. Ça n’a pas de goût au premier abord, c’est confus, et ça demande un certain effort pour y voir de l’intérêt. Mais avec les bons ingrédients, ça peut devenir votre plat préféré. Ou pas. Mais au moins, vous aurez essayé.

Prêt à plonger dans le plus beau RPG auquel personne n’a jamais rien compris ? Restez avec nous, on va vous expliquer pourquoi SaGa Frontier 2 mérite votre curiosité.

Un tableau vivant, un roman touffu et une guerre des familles façon Les Feux de l’Empire

La première chose qui saute aux yeux dans « SaGa Frontier 2 », c’est… eh bien, les yeux. Les tiens, ébahis devant un jeu qui ressemble plus à une expo d’aquarelles qu’à un RPG classique. Chaque décor a l’air d’avoir été peint avec amour par un moine ermite passionné de paysages pastoraux, et le style graphique reste à ce jour une anomalie splendide dans l’histoire du jeu vidéo. Même sur l’écran clinquant d’une Switch OLED ou votre télé dernière génération, c’est une claque visuelle, un peu comme si Van Gogh s’était mis aux JRPG.

Certes, la bande-annonce officielle avait fait flipper tout le monde avec ses sprites flous comme un rêve de lendemain de cuite, mais bonne nouvelle : il existe une option magique dans les menus qui remet tout ça au carré. Le filtre « Point », qui rend les personnages bien nets comme à l’époque, et hop, on retrouve notre jeu tel qu’on l’a connu – mais en haute définition et sans les pixels qui bavent.

L’ambition visuelle ne s’arrête pas là : l’objectif était de donner l’impression de lire un conte de fées. Mais attention, pas un petit conte mignon avec des lutins et des arc-en-ciels. Non, ici c’est plutôt du Game of Thrones sauce JRPG, avec trahisons, héritiers déchus, guerres fratricides et complots à chaque écran. SaGa Frontier 2, c’est deux histoires parallèles et générationnelles, deux grandes fresques narratives qui s’entrelacent sans trop se mélanger (du moins au début) :
Gustave XIII, un prince sans magie ni héritage, mais avec une passion dévorante pour les querelles familiales et les révolutions politiques,
Will Knights, un archéologue-aventurier-chercheur-d’œufs magique (oui, dit comme ça, c’est étrange), embarqué dans une quête qui oscille entre mysticisme et drame familial.

Un récit alambiqué, certes, mais qui mérite le détour si vous êtes du genre à savourer les subtilités scénaristiques et à ne pas zapper les dialogues (en anglais uniquement, parce que bon, la localisation en français, hein… une autre fois peut-être).

Mais la vraie surprise de ce remaster, c’est qu’il ne se contente pas de lisser la peinture. Non non. Square Enix a ajouté une tripotée de nouvelles scènes, parfois même avec des personnages inédits qu’on peut recruter, donnant au jeu des airs de Director’s Cut inattendu, plus complet, plus riche, et bien plus cohérent qu’à l’époque. Et pour les maso de l’exploration, un post-jeu costaud permet de creuser encore plus profond dans la logique étrange du gameplay.

Autre grande nouveauté : le jeu te prend enfin un peu par la main. Fini les morceaux d’histoire choisis au hasard comme dans un bac de promos à la Fnac : ici, un ordre chronologique suggéré permet de mieux comprendre l’intrigue sans pour autant tout te mâcher. Certains crieront au sacrilège (“Kawazu aurait jamais voulu ça !”), d’autres diront merci. Chacun son combat.

Côté confort, le jeu a subi un bon lifting d’ergonomie :
– Menus revus,
– Microgestion plus claire,
– Sauvegardes automatiques,
– Accélération des cinématiques et des combats (merci pour ça),
– Et même une galerie bonus pour admirer les illustrations ou écouter la somptueuse BO de Masashi Hamauzu, toujours aussi magistrale.

Bref, tout ce qu’on attend d’un remaster un peu soigné est là. Et même un peu plus.

Gameplay : “Je combats, donc je suis confus

Autant Square Enix a fait un vrai boulot de restauration sur SaGa Frontier 2, autant ils n’ont pas osé toucher au noyau dur, le « cœur SaGa », cette matière étrange et légèrement radioactive qui fait fuir les âmes sensibles et attire les rôlistes masochistes.

Car oui, aussi beau soit-il, aussi mieux raconté soit-il, SaGa Frontier 2 reste un jeu profondément déroutant, presque par principe. C’est un peu comme un manuel de montage IKEA sans notice, mais avec des runes, des LP, des SP, des WP, des arts martiaux aléatoires, et des armes qui se cassent parce que… pourquoi pas ?
Le système de combat, c’est le genre de truc qui donne des sueurs froides aux fans de RPG classiques : entre les Points de Compétence, les Points de Magie, les Points de Vie (logique), et les Points de “Je sais même plus ce que c’est mais j’en ai plus”, il y a de quoi devenir fou. Et pourtant… il y a une logique là-dedans. Si, si. Juré. Une logique tortueuse, certes, mais présente, comme une énigme à décoder pour accéder au Saint Graal du JRPG de niche.

Les affrontements, au tour par tour, reposent sur la sélection d’attaques et de magies (classique), mais aussi sur la durabilité de tes armes, qui influence directement les compétences utilisables et surtout celles que tu peux apprendre. Oui, ici on apprend à combattre par “illumination”. Littéralement. Tu reçois une « lueur » en plein combat, comme un moine tibétain qui atteint le nirvana au moment de trancher un gobelin.

Et une fois que t’as compris ça, bam : tu découvres que tu peux aussi combiner les attaques pour faire des chaînes de combos spectaculaires, comme si les Power Rangers s’invitaient dans un drame shakespearien.

Mais attendez, ce n’est pas fini. Parce que SaGa Frontier 2 ne fait pas que t’ensevelir sous un gameplay abscons : il varie les plaisirs.
Tu veux du combat stratégique ? Tiens, voilà des duels 1v1 façon Suikoden. Tu veux du conflit épique ? Tiens, des batailles rangées avec leurs propres règles, où tu ne comprends rien pendant trois heures avant d’avoir une illumination digne de Newton sous un pommier. Le tout, bien sûr, sans jamais vraiment t’expliquer comment ça fonctionne. Parce que l’apprentissage, ici, c’est la douleur.

Malgré tout ça, ou peut-être grâce à tout ça, on s’accroche. Et avec cette version Remastered, les joueurs les plus téméraires ont désormais quelques atouts supplémentaires :
Nouveaux personnages jouables,
Transfert de stats via un système d’héritage,
Et même un petit jeu bonus, “Dig! Digger! Dig!”, exhumé de la PocketStation japonaise. Oui, Square Enix est allé chercher dans ses fonds de tiroir pour ramener un mini-jeu que même les fans hardcore avaient oublié. Respect.

NOTRE AVIS

16
20

SaGa, c’est comme le fromage qui pue… c’est clivant, mais ça a du goût SaGa Frontier 2 Remastered, c’est l’élève brillant mais ingérable de la classe RPG. Il a des fulgurances, des élans de génie, mais il te rend fou. Il t’éblouit par sa beauté, il te frustre par sa complexité, et il te fait souffrir pour mieux te récompenser. Alors oui, ce n’est pas un jeu pour tout le monde. Mais si tu as le cœur bien accroché, une tolérance à la frustration digne d’un joueur de Dark Souls, et que tu aimes les expériences qui sortent des sentiers battus, tu pourrais bien y trouver un bijou… ou au moins un très bon sujet de discussion pour briller en société. Et si tu n’aimes pas, eh bien… tu peux toujours lancer *Octopath Traveler*. Là au moins, les PNJ parlent français.

Yakudark

BONS POINTS

  • Un système de combat ultra complet… pour ceux qui aiment se faire mal.
  • Des enchaînements de techniques ultra classes quand on maîtrise enfin le truc.
  • La variante des modes de combat (duels, batailles, groupes) casse la routine.

MAUVAIS POINTS

  • Des mécaniques jamais expliquées : à croire que le jeu te teste personnellement
  • Une difficulté très mal équilibrée avec des pics aussi brutaux qu’imprévisibles
  • Toujours pas de tuto moderne : il faut tout comprendre tout seul comme un grand.

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