Capcom clôture enfin la transposition de la saga Phoenix Wright sur nos plateformes modernes avec cette Apollo Justice: Ace Attorney Trilogy, près de cinq ans après la première compilation. Et entre-temps ? Oh, juste un autre remaster, The Great Ace Attorney Chronicles, accueilli à bras ouverts par la communauté, avec beaucoup plus d’enthousiasme que ce qu’on ressent pour Apollo et sa bande.
Ne vous laissez pas tromper par le titre, qui pourrait faire croire que le fringant Apollo Justice, avec son costume rouge éclatant, est le héros des trois volets. Que nenni ! Ce n’est vrai que pour le quatrième épisode, le dernier signé par le génie créatif Shu Takumi. Ensuite, dans les cinquième et sixième épisodes, on retrouve le bon vieux Phoenix Wright en vedette – même s’il partage parfois la scène avec ses fidèles acolytes. Bref, le pauvre Apollo n’a le projecteur que pendant une partie du spectacle.
Quant aux mécaniques de jeu, elles restent désespérément les mêmes d’un épisode à l’autre. Certes, l’adage dit « si ça fonctionne, pourquoi changer ? », mais on aurait peut-être aimé un peu de variété. Un brin d’originalité entre deux objections, non ?
Pour les novices de la saga, Ace Attorney se présente comme un visual novel qui a su dépasser les frontières du Japon grâce à son mélange unique d’intrigues judiciaires et d’enquêtes à tiroirs. C’est plus qu’un simple jeu narratif : chaque titre est une suite de procès, généralement cinq ou six, où chaque affaire suit une formule bien huilée. Dans cette trilogie, vous trouverez même des cas bonus initialement vendus sous forme de DLC. Sympa, mais pas révolutionnaire.
Les jeux suivent un schéma rigide : on commence par fouiller la scène du crime, visiter le cabinet d’avocats, faire un petit tour en prison pour interroger des suspects. Puis, vient le grand moment, l’heure de vérité en salle d’audience où, tel un gladiateur du barreau, vous devrez dégainer l’index accusateur et crier « Objection ! » au bon moment. Votre but ? Trouver la faille dans les témoignages, la preuve cachée, et faire éclater la vérité. Mais attention, tout est millimétré. Tenter de sortir des sentiers battus et vous serez vite sanctionné. Les développeurs ont soigneusement tracé un chemin, et toute tentative de le contourner risque de se solder par un échec cuisant. En clair, c’est comme participer à une course où vous ne pouvez pas dévier d’une seule ligne droite.
Au fil des ans, la saga a introduit quelques nouveautés pour rafraîchir une formule qui, avouons-le, commençait à se faire un peu prévisible. Dual Destinies a amené la « Matrice des Émotions » d’Athena Cykes, un outil qui vous permet de déceler les incohérences entre les mots et le langage corporel des témoins. Puis dans Spirit of Justice, Rayfa et ses arts divinatoires vous offrent une petite plongée dans les derniers instants de la vie des victimes. De quoi pimenter un peu l’affaire, mais soyons honnêtes, ces ajouts ressemblent plus à des effets de manche qu’à de véritables bouleversements du gameplay.
Enfin, la saga conserve toujours quelques énigmes historiques aussi obscures que tordues, où la logique s’efface devant l’essai-erreur. Heureusement, ces moments de pure confusion sont rares… mais ils sont bien là pour nous rappeler que la perfection n’existe pas, même dans un tribunal de pixels.
Si vous pensiez que la linéarité de Ace Attorney allait réduire sa durée de vie à peau de chagrin, détrompez-vous. Ici, le temps n’est pas mesuré en actions trépidantes, mais en… lecture. Beaucoup de lecture. À la manière d’un bon vieux roman fleuve japonais, le jeu vous inonde de dialogues interminables. Pour vous donner une idée, un seul cas peut vous aspirer pendant six à sept heures, durant lesquelles votre activité principale sera d’avaler des tonnes de texte. Pas de panique, l’écriture est soignée, mais disons-le franchement : Ace Attorney, c’est plus un manga interactif qu’une véritable aventure vidéoludique.
Côté ambiance, la série garde son style léger, presque absurde, frôlant parfois la démence avec ses personnages exubérants et ses dialogues farfelus. Cela dit, elle sait aussi saupoudrer un peu de drame bien dosé quand il le faut, un équilibre qui rappelle les premiers volets de la série. L’absence de Shu Takumi, le créateur original et maître d’œuvre des trois premiers épisodes, se fait sentir, mais ses successeurs ont fait des efforts louables pour rester fidèles à son style inimitable. Les personnages, toujours aussi hauts en couleur, sont d’autant plus attachants que même les antagonistes finissent par nous émouvoir.
Un autre point positif, la saga a su construire un fil conducteur entre les épisodes. On assiste à une véritable évolution de Phoenix Wright et de ses acolytes. Les événements de Dual Destinies se déroulent un an après ceux de Apollo Justice, tandis que Spirit of Justice prend place deux ans plus tard. Ce n’est pas juste une série de procès décousus ; c’est une véritable saga épique, où chaque chapitre enrichit la trame globale.
Bref, si vous aimez les longues lectures interactives, avec un soupçon d’humour et un zeste de drame, vous en aurez pour votre argent… et pour vos yeux.
La saga Ace Attorney s’étend sur une période plutôt longue, avec des titres sortis entre 2007 et 2016. Le premier épisode, Apollo Justice, est arrivé sur Nintendo DS, tandis que Dual Destinies et Spirit of Justice ont vu le jour sur 3DS en 2013 et 2016, respectivement. Dans le petit monde des visual novels, l’évolution technique n’est pas spectaculaire, mais en dix ans, on voit quand même quelques progrès. Grâce à cette remasterisation en haute définition, les années se font moins sentir, même si la transition vers des modèles 3D, inaugurée avec Dual Destinies, reste l’évolution la plus frappante dans cette trilogie.
Jouer les titres à la suite permet d’ailleurs de mesurer cette évolution : du plus ancien au plus récent, la différence est nette. Les épisodes les plus récents sont parsemés de cinématiques animées, des petites perles visuelles qui apportent une touche de modernité et de dynamisme. Côté technique, Capcom a fait un travail correct : les environnements s’adaptent bien aux écrans PC, même en 4K, et les contrôles ont été revus pour être compatibles avec la souris et le clavier. Cerise sur le gâteau, une section « musée » a été ajoutée pour donner un peu plus de corps à l’ensemble. On y trouve la bande originale des trois jeux, avec quelques morceaux en version orchestrale, et une collection de croquis. Sympa pour les amateurs d’art conceptuel.
En somme, cette collection est un bel hommage à la saga, mais elle trébuche sur des détails importants. On applaudit les efforts techniques, mais on reste perplexe face à certains choix de Capcom.
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Capcom s’est enfin décidé à clore son marathon de remasterisation avec Apollo Justice: Ace Attorney Trilogy. Le résultat ? Une conversion propre, soignée, qui rend hommage aux trois jeux de la saga... mais sans véritablement sortir le grand jeu. Oui, la remasterisation est réussie, mais tout ce polish mériterait un petit plus, quelques extras pour motiver les fans de la première heure à se replonger dans les salles d’audience virtuelles. Pour les inconditionnels de Phoenix Wright, cette trilogie est un achat presque obligatoire... mais, et c’est un "mais" de taille, il faut déjà avoir la première trilogie dans votre bibliothèque. Celle-ci, avec ses récits encore plus intenses et un prix désormais abordable, surpasse largement ce nouveau pack.
Yakudark